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Financial Crimes Commission : Superstructure et hyperinquiétude

Written by on December 5, 2023

Financial Crimes Commission : Superstructure et hyperinquiétude

Le sujet est assez grave et ce n’est donc pas étonnant qu’il a largement été commenté ces derniers jours. Vendredi dernier, le gouvernement a déposé un projet de loi qui préconise la mise en place d’une nouvelle institution, la Financial Crimes Commission (FCC) qui se concentrerait sur la lutte contre les délits financiers comme la fraude, la corruption et le blanchiment d’argent sale. Il pourrait être voté d’ici à la fin de l’année et entrer en vigueur au début de 2024.

« La FCC fait peur, commente L’Express de lundi. Pas aux criminels mais aux légistes et aux opposants du régime qui peuvent, entre autres, se voir imposer des charges provisoires et qui risquent de se retrouver en détention provisoire pendant des longs mois, de ne jouir d’une liberté conditionnelle relative avec des mesures contraignantes pendant des années et de voir leurs biens gelés ». Présentée comme un instrument de réforme, la FCC existera parallèlement à la tristement notoire Independent Commission Against Corruption (ICAC) où les enquêtes sont menées à des rythmes différents dépendant de sa proximité ou sa distance avec le pouvoir en place.

Pouvoir accru à Pravind Jugnauth

C’est le premier ministre qui nommera le directeur de la FCC. En théorie en consultation avec le leader de l’opposition. En somme, la crainte est que le chef de la nouvelle institution soit un homme du parti dont la tâche sera d’exécuter les basses besognes du régime. Dans la tête de Navin Ramgoolam, le leader du Parti travailliste et principal challenger de Pravind Jugnauth lors des prochaines élections, « avec la FCC, on tente d’éliminer les opposants avant même les élections ». Dans une interview accordée à L’Express de mardi, il s’inquiète d’abord du timing. Il dénonce que « cette loi aussi importante qui change fondamentalement les procédures des enquêtes et qui concentre des pouvoirs très étendus à une seule autorité est en train d’être fast-tracked sans discussion aucune. Pire, c’est un nominé politique qui décidera de tout. C’est lui qui fera l’enquête, c’est lui qui décidera de poursuivre. C’est lui qui demandera de geler les avoirs d’un accusé et c’est lui-même qui demandera la confiscations des biens de l’accusé ». Pour l’ancien chef de gouvernement, cette loi sonne le glas de nos libertés et de notre démocratie. C’est une loi qui est inadmissible que ce soit sur le plan légal, politique ou éthique.

La FCC se passera du Directeur des poursuites publiques

Dans son éditoriale dans L’Express de dimanche, le rédacteur en chef Nad Sivaramen fait ressortir qu’alors que la Cour suprême étudie le litige institutionnel entre le Directeur des poursuites publiques (DPP) et le Commissaire de police au sujet de la remise en liberté provisoire, le FCC Bill propose des changements majeurs à la Bail Act et à la Courts Act. « C’est un manque de respect, ou plutôt un flagrant viol du principe de la séparation des pouvoir », dénonce-t-il. A présent, le DPP constitue un garant de respects des règles en matière d’accusations et de poursuites. Avec la FCC, cette garantie volera en éclats. Le rédacteur en chef de l’Express fait remarquer que la FCC constituera une arme redoutable alors que la campagne électorale commence. Le gel des avoirs des dirigeants politiques comme Navin Ramgoolam, Sherry Singh ou Roshi Bhadain sera décidée par un nominé politique.

Quand le PMSD avait claqué la porte

Week-End rappelle à bon escient qu’en 2016, le PMSD alors allié du MSM, avait claqué la porte du gouvernement qui voulait qu’une Prosecution Commission contrôle les actions du DPP. « Un geste courageux, quand bien même ponctuel et ancien, se doit être salué, écrit l’éditorialiste. Parce qu’un sursaut, un réveil des consciences, un peu d’honneur et d’amour propre, ce n’est pas donné à tout le monde. »

Le Premier ministre ne craint rien

Alors que l’inquiétude monte non seulement chez l’opposition politique, mais aussi au sein du Bar Council et autres ONG, le Premier ministre n’en parle pas trop. Mais selon Le Défi de mardi, il a profité de l’inauguration d’une Multi-Purpose Game Area pour lancer « nous sommes en train d’introduire une loi et certains disent qu’ils sont la cible. Ceux qui ont les mains propres n’ont rien à craindre. En tout cas, pour ma part, je ne crains rien parce que j’ai toujours agi selon les paramètres légaux ».